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Agent de sécurité




1. Un malentendu
« - Vous avez déjà fait ça ?
  • Non...
  • Vous avez une formation incendie alors ?
  • Euh, non...
  • On vous a fourni un uniforme ?
  • Pas du tout...
  • Nan parce qu'ici, on est tous des hommes, on a des costards. Mais vous alors... Ben il va falloir venir en jupe. Vous avez un tailleur ?
  • Ben... Non.»
Moi, 1m70, 58kg et un physique qui n'impressionnerait pas un gamin de deux ans, je vais être... agent de sécurité.
Je ne sais pas ce qui m'a pris de postuler à cette offre d'emploi, c'était un acte de pur désespoir après des semaines de recherches de job infructueuses. Mais résultat : je suis prise. Et voilà qu'il faudrait que j'aille manier des lances à incendie en tailleur. Ça va pas être possible... Ils ont vraiment regardé mon curriculum vitae ?!

Première approche.
Face à moi, quatre hommes en costard, montés comme des armoires, me dévisagent avec des regards de mâle en rut. Ça dure plusieurs minutes pendant lesquelles la communication se réduit à « C'est la nouvelle, hinhin... Enchanté, hinhin... Qui c'est qui la forme, hinhin... »

Seconde approche
Monsieur Paumas... La trentaine, séducteur aguerri qui roule des mécaniques et sent le parfum pour homme, m'invite à prendre un café de manière très professionnelle. Et là... C'est le drâme :
«- 'faut que je vous prévienne tout de suite Mademoiselle Renac, vous êtes tombée dans une mauvaise période... officiellement... C'est MOI le chef. Officieusement... ils essaient de me virer! »
S'en suit une énumération complète des conflits internes et pire, des problèmes intimes des personnes qui m'entourent. Je n'ose même plus me demander dans quoi je me suis encore embarquée.

La mafia au téléphone
D'un côté, il y a le Conseil Général qui m'a donné des horaires de travail, de l'autre, il y a Monsieur Bandito, chef de la sécurité aux accents de mafioso corse, qui m'a également donné des horaires de travail. Évidement, ce ne sont pas les même. Et chacun campe sur ses positions. Au bout d'une heure de négociations infructueuses, j'explose, et sous les yeux des quatre agents de sécurité éberlués, je somme monsieur Bandito, qu'il soit chef de la sécurité ou chef de la mafia, de se mettre d'accord avec le conseil Général, ou d'aller se chercher des stagiaires ailleurs.
Ils se sont mis d'accord.

Ma formation
Elle dure deux heures, au grand drame de mon formateur qui est un savant mélange de musclor et d'un bisounours géant. Ça l'angoisse tellement qu'il finit par demander à ce qu'un autre agent de sécurité soit présent pendant mes heures de travail.

Un agent de sécurité pour sécuriser l'agent(e) de sécurité
Au moins trois personnes sont venues faire de la prévention : « tu vas voir... Il sent pas très bon... » Génial...Moi, ce que je découvre, c'est un homme petit et trapu qui remet constamment une mèche de cheveux en place tel un surfeur hawaïen. Mon agent de sécurité se met à danser le zook sous la réplique de palmier du hall d'entrée, joue aux flêchettes avec des punaises et répond au téléphone en tenant le combiné à l'envers. Je trouve cela bien plus remarquable que son odeur.

« Chef, la clé du Paradis »
ça c'est Jacques, le responsable du ménage, qui me demande la clé du placard
à balais.

Finalement
Au bout d'une semaine, je suis complètement intégrée dans l'équipe : un séducteur, un bisounours géant, un danseur de zook et une étudiante pour assurer la sécurité des Archives Départementales, ça décoiffe.